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Noir couture : la loi du T=Cs+Se

Il y a déjà un petit moment que je voulais écrire un billet sur le nom  des couleurs de  carrosserie de voitures. Ce que dans le métier, on appelle les couleurs de caisse. Non, non, ne riez pas, je suis très sérieux. C’est un vrai sujet tant les constructeurs automobiles rivalisent d’imagination pour trouver des petits noms originaux aux teintes qu’ils mitonnent avec amour. En effet, sur leur palette, il y a fatalement plusieurs rouges, plusieurs blancs, plusieurs gris… Et pour les vendre, mieux vaut un nom qu’un numéro. Bref, c’est tout aussi surprenant, mais c’est finalement une publicité de Givenchy qui me fait sauter le pas. Il faut dire qu’elle vante les charmes d’un mascara dénommé Noir couture.

Pas de test, pas d’essai personnel dudit mascara. Je reconnais que le maquillage est une profonde lacune dans ma culture générale. C’est son nom qui m’intéresse vous l’avez compris. Car justement, ce nom a tout pour figurer parmi un nuancier de teintes de carosseries. Noir couture : il s’agit d’une apposition entre une couleur substantivée (utilisée comme un nom) et un autre substantif (couture) que l’on veut évocateur, métaphorique (ici évidemment il s’agit de l’univers du luxe, de la haute couture, du sur mesure et de l’élégance). Voire vaguement poétique. Retenez donc la formule Teinte = Couleur substantivée + Substantif évocateur, que je formulerai ainsi, en hommage aux équations-bilans de mes cours de chimie du lycée : T=Cs+Se

Blanc banquise et Rouge Erythrée

La formule T=Cs+Se étant à présent démontrée, nous allons boucler la boucle et refaire un tour du côté des constructeurs automobiles et plus précisément de leurs nuanciers. Par exemple, je configure une 208 5 portes sur le site de Peugeot. Que me propose-t-on comme couleur de caisse ? Mais du Blanc banquise, du Gris shark, du Rouge Érythrée (à ne pas confondre avec le Rouge Babylone de la 308 par exemple), du Noir obsidien (ou perla nera) et j’en passe. Autrement dit : T=Cs+Se ! Et chez Renault aussi, T=Cs+Se. J’en veux pour preuve le Gris Cassiopée ou le Rouge flamme. Enfin une vérité immuable de l’univers du make up jusqu’à celui de l’industrie automobile ?

Adopte un mec, Meetic, Attractive World… la guerre de l’amour

Chaque année en janvier, les supermarchés font des promos sur le blanc. Dès le début du mois d’août, c’est le tour des catalogues consacrés aux cartables et cahiers d’inonder nos boîtes aux lettres. Et ainsi de suite : c’est ce qu’on appelle les marronniers, les temps forts d’une actualité commerciale qui reviennent année après année de façon cyclique. Fin janvier-début février : la Saint-Valentin approche. Il suffit de prendre le métro pour s’en rendre compte, la guerre des sites de rencontres est lancée ! La cible marketing : les femmes évidemment.

Affiche Meetic "Vous pourriez rencontrer l'homme de votre vie sur la ligne 8. Enfin s'il prend la ligne 8"

 

Meetic s’adresse directement à elles avec une campagne simple et sobre qui met en scène une série d’accroches sur fond de couleurs pastels, plutôt girlie mais pas trop. L’idée de cette campagne de « pub augmentée » ? Donner du sens à l’affiche par rapport à son lieu-même d’implantation géographique (d’où un effort de déclinaison important : je ne sais pas d’ailleurs si la campagne concerne la province ou seulement Paris), sur le mode « vous lisez cette affiche à l’endroit X ; peut-être l’homme de votre vie se trouve aussi à l’endroit X. Ou peut-être pas d’ailleurs ». Sous-entendu : mettez toutes les chances de votre côté en sortant des lieux que vous fréquentez au quotidien pour aller faire un tour sur Meetic.

Affiche Attractive World : célibataire et exigeant ?

 

Attractive World se veut un site plus select, l’acceptation de nouveaux membres se fait d’ailleurs par cooptation.C’est le site de rencontres pour ceux qui sont (ou se croient) beaux, intelligents, riches et bien au-dessus du bas peuple qui fricote sur Meetic. C’est un positionnement marketing qui se tient mais qui est résumé de façon assez tiède et hypocrite par la promesse du site « des rencontres pour des célibataires exigeants ». Tant qu’à jouer la carte du snobisme autant y aller à fond. Et quant à l’affiche publicitaire, je ne suis pas sûr que nos fameux célibataires si « exigeants » se retrouvent vraiment dans cet univers cheap qui ressemble à une réclame pour un serveur minitel ou (au choix) une pièce de théâtre de boulevard. Bref, vous aurez compris, ma langue de pub n’aime pas.

Série spéciale carottesAdopte un mec : bannière série spéciale carotte

Dernier acteur de la mêlée : Adopte un mec, dont je ne cite pas la récente affiche noire et blanche très sobre, mais une bannière qui tourne dans certains encarts publicitaires du web. Qui comme d’habitude attaque sa cible de façon plus décalée et drôle, en parodiant les codes publicitaires, ici le concept de série spéciale. Et en filant la métaphore maraîchère… Là, j’aime !

Mais le plus important, c’est votre avis les filles. Meetic, Atttractive World ou Adopte un mec : à votre avis, où se trouve l’homme de votre vie ?

La potion magique de Yannick Noah

L’éditorial de Yannick Noah paru dans Le Monde ce week-end (La potion magique) fait couler beaucoup d’encre et de fiel des deux côtés des Pyrénées. Il faut dire que le tennisman préféré des Français n’y va pas avec le dos de la raquette puisqu’il accuse explicitement la génération dorée du sport espagnol (Nadal, Contador, les basketteurs champions d’Europe, les footballeurs champions du monde, etc.) de recourir au dopage généralisé, et qu’il conclut sa tribune par une prise de position délibérément provocatrice : s’il faut être chargé pour gagner, alors autorisons EPO et autres molécules chimiques.

Yannick Noah

Je ne suis pas un spécialiste sportif, ni un médecin expert : mais ce que dit Noah, j’ai du l’entendre mille fois dans les contextes les plus différents, dans la bouche d’un journaliste, d’un sportif repenti, d’un de mes oncles, d’un pilier de bar, d’un chauffeur de taxi ou d’un médecin.

Clichés et lieux communs

Sur le fond : l’éditorial de Noah est un topos, un lieu commun, un cliché. Sur la forme : son discours est très simple, peu argumenté, il utilise des procédés stylistiques basiques : une métaphore filée transparente (la potion magique), l’épiphore (la répétition à la fin des premiers paragraphes de « les veinards ») et le paradoxe (la conclusion : autorisons le dopage). On pourra toujours dire que l’ex-tennisman chantant fait du populisme, de la démagogie, qu’il simplifie à l’extrême et caricature des situations infiniment compliquées, qu’étant donné son statut et sa légitimité, il devrait peser davantage ses propos et ses accusations portées sans preuve.

Reste que je suis émerveillé que des propos aussi simples puissent créer un tel ramdam. Le sport est un milieu très conservateur et chauvin : transposé dans le domaine de la politique par exemple, en remplaçant la question du dopage par, disons, celle du financement occulte des partis politiques, le propos de Noah serait sans doute passé inaperçu. Quant au dopage, c’est vraiment le dernier tabou, l’accusation ultime qui salit celui qui la reçoit comme celui qui la porte. Je vous laisse vous faire votre opinion en consultant le texte de l’éditorial de Noah : « La potion magique ».

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